mercredi 9 avril 2025

Black Box Diaries, Shiori Itō

En 2015, Shiori Itō, jeune journaliste, se rend à un entretien avec Noriyuki Yamaguchi, correspondant d'une chaîne de télé japonaise aux États-Unis et proche du premier ministre de l'époque, Shinzo Abe. Yamagushi la drogue, l'emmène à son hôtel et la viole. Malgré les conseils de son entourage qui lui demande de ne pas en parler pour ne pas nuire à sa carrière, Itō décide de porter plainte et devant l'inaction de la justice, de dévoiler l'affaire publiquement. Ce sera le début du mouvement metoo au Japon.

Black Box Diaries est un documentaire difficile. Réalisé par Itō, il mêle des images filmées par un·e caméraman, des séquences prises par elle-même avec son smartphone et une capture de la videosurveillance de l'hôtel, où on la voit sortie du taxi par son violeur alors qu'elle tient à peine debout. Ce n'est pas un documentaire sur le viol en lui-même, mais sur le combat d'Itō pour faire bouger la justice, pour que la culpabilité de Yamaguchi soit reconnue, pour que, pour reprendre l'expression connue, la honte change de camp, dans un pays où 96% des viols restent impunis (ce n'est guère mieux en France). Mais Black Box Diaries est aussi un film plein d'espoir et les deux scènes les plus fortes en témoignent : d'abord lorsque Shiori Itō parle devant des consœurs journalistes et qu'elle ressent un véritable soutien de personnes qu'elle ne connaît pas, ensuite lorsque le portier de l'hôtel l'appelle et accepte, malgré le risque de perdre son emploi, de témoigner en sa faveur, de dire qu'il l'a vue tenter de résister à son violeur lorsque celui-ci l'a sortie du taxi, droguée et réticente.

Black Box Diaries n'a pas trouvé de distributeur au Japon et a provoqué une polémique dans le pays sur l'utilisation d'images sans autorisation (celles de la vidéosurveillance de l'hôtel). On ne peut que le regretter étant donné l'importance d'un tel document. J'ai beaucoup pensé à Toute la Beauté et le sang versé, le documentaire de Laura Poitras sur Nan Golding et son combat contre le labo pharmaceutique producteur d'opiacé responsable de nombreux morts aux USA. Allez voir ces films, ils sont aussi difficiles qu'utiles, il est important de les soutenir.

lundi 7 avril 2025

Où es-tu, monde admirable, Sally Rooney

Alice et Eileen se sont connues à Dublin à l'université et sont devenues des amies proches. Alors qu'Alice est une romancière à succès dépressive qui s'est installée à sa sortie de l'hôpital psy dans une maison d'un petit village où elle a rencontré Felix via tinder, Eileen vivote à la rédaction d'un magazine, gagne à peine de quoi vivre et est aussi seule, plus ou moins amoureuse de Simon, un ami d'enfance.

De Sally Rooney j'avais lu Normal people l'année dernière et ce récit m'avait laissé une impression bizarre, un malaise dans le traitement de son personnage féminin principal. Ce second roman me laisse aussi sur un sentiment ambivalent. Si l'on sent bien à travers Alice et Eileen un certain rejet de la société actuelle, une perte de repère, une désillusion quant à leur rôle, c'est malheureusement rendu de manière un peu trop superficielle, les personnages semblant plus concernés par leurs pratiques sexuelles que par l'état du monde. Pour paraphraser Eilen : oui, le monde n'est plus le même depuis que le communisme est mort avec l'union soviétique, donc replions-nous égoïstement sur nous-même et évacuons le reste. La relation entre Alice et Felix, entre l'autrice riche et le prolo de la campagne qui gagne mal sa vie en effectuant de la manutention, ne déclenche chez aucun des deux une réflexion de classe et la description de leurs ébats sexuels qui semblent être le sommet de leur relation provoque un certain ennui chez le lecteur. 

Livre générationnel certainement, mélange de déception, de froideur et d'illusions perdues (si elles ont jamais existé), reflet d'une époque où pour beaucoup l'avenir n'est plus lisible : Où es-tu, monde admirable est une lecture déconcertante quand on est d'une autre génération. Il faut attendre la fin et une dispute entre les deux amies pour voir surgir l'émotion avec des phrases qui font mouche, qui remuent quand on a connu une telle situation. Il y a certainement beaucoup de l'autrice dans ce récit (elle a à peu près l'âge de ses personnages) et malgré le sentiment mitigé que dégage ce roman il me sera intéressant de voir comment ses récits évoluent.

dimanche 6 avril 2025

Turlupin, Leo Perutz

Nous sommes en 1642 et Richelieu, proche de la mort, prépare un extravagant complot pour mettre fin à la royauté et à l'aristocratie qu'il déteste : assassiner le jour de la Saint-Martin les 17000 nobles français. Turlupin, jeune orphelin apprenti d'un fabricant de perruques, se rend par erreur à l'enterrement d'un noble et se retrouve entrainé malgré lui dans le sillage de ce complot qu'il fera échouer à son insu.

Leo Perutz, écrivain autrichien de langue allemande né à Prague à la fin du 19e siècle, est particulièrement doué pour les intrigues tordues, les personnages fanfarons et les situations rocambolesques. Il manie tout cela avec une dextérité sans égale aussi bien dans des romans de son époque (le Tour du cadran), que dans des récits historiques (le Cavalier suédois).  Aussi lorsque j'ai trouvé ce Turlupin au fond d'un lieu de perdition ma joie a été grande : Un Perutz que je ne connaissais pas !

Malheureusement, soyons honnètes : ce n'est pas son meilleur roman. Si le pitch est totalement perutzien, la réalisation est légère et seul le côté burlesque mérite le détour. L'intrigue suit son cours mollement et la résolution n'est guère surprenante ; l'auteur ne devait pas être en grande forme. Alors allez plutôt lire le Tour du cadran pour voir se déployer tout le talent du merveilleux Perutz.

mercredi 2 avril 2025

Radio Prague, les ondes de la révolte, Jiří Mádl

Fin 1967, un groupe de journalistes de la radio tchécoslovaque dirigé par Milan Weiner essaie de contourner la censure pour diffuser des informations fiables en provenance d'autres sources que le bloc soviétique. L'arrivée au pouvoir d'Alexander Dubček en janvier 68 et sa volonté de développer un "socialisme au visage humain" supprime complètement la censure mais provoque une réaction violente de l'union soviétique. Lors de l'invasion du pays par les troupes du pacte de Varsovie en aout 68 les journalistes tentent d'émettre le plus longtemps possible pour protester.

Si le printemps de Prague a marqué la génération soixanthuitarde comme un signe avant-coureur de l'effondrement du bloc soviétique et comme l'échec du communisme autoritaire soviétique, cette période ne doit plus beaucoup parler aux générations actuelles. C'était pourtant, contrairement à ce qu'il s'est passé par la suite dans tout le bloc de l'est, une tentative de réforme de ce régime en se débarrassant de ses atours autoritaires pour le remplacer par un socialisme démocratique plutôt que par un passage au capitalisme. "Radio Prague" est donc un film utile pour se rappeler qu'une telle tentative a eu lieu et qu'elle a été écrasée par la violence, provoquant une centaine de morts dans la population civile tchecoslovaque. 

En se concentrant sur cette équipe de journalistes, Radio Prague permet de bien comprendre les événements ; mais on peut regretter une réalisation un peu maladroite par moment, mélant vraies et fausses images d'archive, centrant un peu trop le film sur deux personnages au détriment d'une vue plus générale. On oubliera ses quelques défauts pour se concentrer sur l'essentiel : c'est un film important pour la mémoire de ce pays (il a d'ailleurs eu beaucoup de succès en Tchéquie depuis sa sortie en aout dernier).

mardi 1 avril 2025

Un trimestre bien rempli

J'ai créé ce blog pour m'encourager (me forcer ?) à écrire un peu régulièrement autre chose que mes chroniques. 29 billets en trois mois, je ne suis pas trop mécontent du résultat.
Alors profitons de la fin de ce premier trimestre pour faire un bilan culturel.

Cinéma

Beaucoup de bons films ce trimestre, difficile de n'en sélectionner que quelques uns.
Prima la Vita, un hommage de Francesca Comencini à son père et à leur amour du cinéma. C'est beau, cela déborde d'émotion, certainement le plus beau film sur le cinéma depuis Empire of Light. La Chambre d'à côté, de Pedro Almodovar, un film tout en douceur sur l'approche de la mort, portée par deux actrices formidables, Julianne Moore et Tilda Swinton. En fanfare, une comédie sociale pleine de bons sentiments qui fonctionne très bien. La Pampa, un film dur sur l'adolescence et l'éveil à l'amour. Black Dog et sa relation entre un homme et un chien sauvage dans une ville en cours d'abandon à la limite du désert de Gobi. September & July et ses relations familiales tordues. The insider, bel hommage à l'espionnage à la John Le Carré. Et enfin un peu de légereté avec Jane Austen a gâché ma vie, de la comédie romantique à l'anglaise.

Séries

Beaucoup de déceptions : Silo est une série terne, Le Problème à trois corps ne laisse pas grand souvenir, 22.11.63 est plutôt agréable mais aurait mérité un autre acteur principal, Paradise n'apporte pas grand chose au post-apo et je préfère ne pas reparler du naufrage qu'est Prime Target.

Ma grande révélation de la période est Ted Lasso. Beaucoup d'ami·es m'en avaient dit du bien et c'était tout à fait justifié : cette série au décor footballesque est terriblement touchante, avec des personnages incroyablement bien construits. On rit, on pleure, on est embarqué à leur côté dans leurs bêtises, leurs échecs et leurs réussites. Les fausses notes sont très peu nombreuses sur ces trois saisons, espérons que la quatrième que l'on attendait pas ne gâche pas tout cela.

Livres

J'ai lu 35 livres ce trimestre, je vais essayer de n'en sélectionner que quelques uns ^^.
Tout d'abord deux livres qui se répondent, deux romans anglais sur des femmes passionnées de paléontologie : Prodigieuses créatures de Tracy Chevalier et Le Serpent de l'Essex de Sarah Perry. Le premier est une biographie qui se lit comme un roman, le second est un roman qu'on aimerait être une biographie. Toujours dans l'Angleterre du 19e, Du bout des doigts de Sarah Waters et son impressionante intrigue à multiples twists.
En horreur, quelques bonnes pioches : l'incontournable Grady Hendrix avec Détruire tous les monstres, Carcoma de Layla Martinez, ses femmes espagnoles et leurs relations étranges, et surtout le formidable Le Pêcheur de John Langan.
Du côté de la science-fiction, c'est un peu le désert. Pas vraiment de texte intéressant, aussi bien en VO qu'en VF, donc on se console avec Le Tout de Dave Eggers, paru en collection blanche, qui nous décrit une multinationale technologique se permettant via ses produits une surveillance et un contrôle presque total de la vie privée de la population. On aimerait que ce soit de la SF, mais tout cela parait bien trop familier et effrayant.
Enfin un peu de nature writing avec Les Terres indomptées de Lauren Groff et sa formidable héroïne qui abandonne la civilisation et ses horreurs.
 

 

samedi 29 mars 2025

The Insider, Steven Soderbergh

George et Kathryn sont un couple d'espions britanniques. Lorsqu'un virus informatique est dérobé et en passe d'être vendu à la Russie, George est informé que le vol a été perpétré par une taupe au sein de leur service et une liste de cinq suspects lui est fournie. Il doit enquêter rapidement et éliminer la taupe. Problème : sa femme est dans la liste des cinq.

J'avais été un peu déçu par le précedent Soderbergh, Présence, dont le scénario signé David Koepp (tout comme celui de The Insider) m'avait semblé quelconque. Ce film d'espionnage est donc une excellente surprise : son ambiance et son scénario à la John Le Carré (on est clairement dans l'hommage à La Taupe), son rythme sans temps mort (le film dure 1h30 et ne contient aucun temps mort), ses huis-clos autour d'une table, ses multiples pistes, son utilisation crédible de la technologie, contribuent à l'efficacité du film. 

Tout tourne autour de ce couple, à la connaissance intime qu'ils ont l'un de l'autre et qui permet à George d'avancer masqué, d'enquêter sur ses collègues et amis. On est pris dès les premières minutes par cette ambiance étrange, mélange de méfiance et de connivence, grâce à ce remarquable duo d'acteurs que font Michael Fassbender et Kate Blanchett. Allez-y, vous ne serez pas déçu.

vendredi 28 mars 2025

Le temps de l'innocence, Edith Wharton

Newland Archer, jeune homme de l'aristocratie new-yorkaise de la fin du 19e, doit épouser May Welland. Mais le comtesse Ellen Oleska, une amie d'enfance mariée à un noble européen qu'elle a fui revient à New-York avec l'intention de divorcer. Newland est tiraillé entre May, avec qui il aura une vie tranquille voire terne, et Ellen, celle qu'il aime réellement, mais qui sera source de scandale.

Écrit en 1920 par Edith Wharton, elle-même issue de ce milieu newyorkais, ce roman est la description d'une société figée dans ses principes, où le respect des règles est plus important que tout le reste, où le paraître dirige tout, où la seule apparition d'une femme voulant divorcer dans une loge d'opéra semble être un scandale insurmontable. Wharton, mariée à un homme fade, a elle-même divorcé et s'est installée en Europe ; elle a visiblement des comptes à régler avec ce carcan aristocratique. Le Temps de l'innocence n'est certes pas un roman des plus agréables à lire, tant la vie factice et ennuyeuse de cette haute-bourgeoisie est insupportable, et si Newland Archer rate sa vie presque aussi bien qu'Emma Bovary, on est impressionné par la manière dont Wharton nous décrit ce monde tout comme on était impressionné par le réalisme cruel de Flaubert. Le Temps de l'innocence a remporté le prix Pulitzer en 1921 et a été adapté au cinéma par Scorcese en 1993,

(Il faudra m'expliquer pourquoi l'éditeur français ne daigne pas mettre le prénom d'Edith Wharton sur la couverture. J'avais déjà remarqué cela avec George Eliot chez un autre éditeur. Étant passé récemment dans des librairies anglaises, ce n'est pas le cas des versions originales.)

mardi 25 mars 2025

Le Serpent de l'Essex, Sarah Perry

Maintenant que je vous ai présenté Mary Anning, la paléontologue autodidacte, dans le précédent billet, Je peux vous parler de Cora Seaborne et de son mystérieux serpent.

Point de biographie cette fois, nous sommes en pleine fiction. Toujours dans l'Angleterre victorienne, Cora Seaborne est délivrée d'un mariage pénible à la mort de son époux. Mariée trop jeune, elle n'a connu que cette vie morne au côté d'un homme détestable. Aussi, passée la tristesse feinte du deuil, laisse t-elle libre cours à sa passion, la paléontologie, et veut-elle marcher dans les traces de son modèle, Mary Anning. 

Accompagnée de son amie Martha et de son fils Francis (un adolescent au comportement étrange qui serait certainement diagnostiqué autiste aujourd'hui), Cora se rend dans un petit village de la côte de l'essex où une légende de deux siècles et quelques témoignages récents attestent de l'apparition d'une mystérieuse créature, un serpent géant. Cora va se lier au pasteur local et à sa femme, alors que Luke, un chirurgien londonien, a de plus en plus de mal à cacher son amour pour Cora.

Le serpent de l'Essex est un livre qui part un peu dans tous les sens : roman d'apprentissage tardif via son personnage principal qui ne s'émancipe que suite à la mort de son mari, roman rural avec ce petit village, ses personnages folkloriques et ses légendes et superstitions, roman social traitant des mauvaises conditions de logement des travailleurs pauvres de Londres et des préjugés de classe de la bourgeoisie, roman religieux avec ce pasteur dont la foi est mise à l'épreuve, enfin roman sentimental avec les multiples relations inachevées ou ratées entre les différents personnages.

Cela pourrait faire peur, mais Sarah Perry maîtrise grandement ses sujets et fait de Cora la personne autour de laquelle tout gravite. L'innocence, la maladresse, mais aussi la volonté et l'énergie de cette femme trop longtemps enfermée dans son rôle d'épouse et qui ne connait pas grand chose de la vie et du monde quand elle accède enfin à la liberté permettent à l'autrice de développer tous ces thèmes avec harmonie, attribuant des rôles bien précis aux personnages secondaires, se permettant des appartés sans rapport avec l'intrigue principale sans pour autant ennuyer le lecteur, nous dressant un portrait détaillé de l'Angleterre de l'époque. 

On aimerait tout simplement que Cora ait réellement existé, qu'elle eut été l'héritière un peu maladroite de Mary Anning et on s'imagine la croiser dans le Londres du 19e, profiter aussi bien de sa fougue que de ses maladresses. Alors lisez Prodigieuses créatures de Tracy Chevalier puis enchaînez avec Le Serpent de l'Essex et vous aurez bien du mal à vous retenir d'aller visiter les côtes anglaises, aussi bien pour ses fossiles que pour ses personnages.

dimanche 23 mars 2025

Prodigieuses créatures, Tracy Chevalier

Je voulais vous parler de ma dernière lecture Le serpent de l'Essex de Sarah Perry, mais ce livre est tellement dans la continuité de Prodigieuses créatures que je dois d'abord vous en toucher deux mots.

Prodigieuses créatures donc, de Tracy Chevalier (j'ai l'impression de ne lire que des autrices anglaises en ce moment (Chevalier, née à Washington, est londonienne depuis longtemps), est la biographie romancée de Mary Anning. Cette femme du début du 19e siècle, fille d'un charpentier, vivait sur la côte du Dorset. Elle ramassait des fossiles pour les vendre aux touristes et découvrit ainsi de nombreux spécimens encore inconnus (parmi eux le premier ptérodactyle complet). N'ayant pas fait d'études et étant une femme, ses relations avec les scientifiques furent évidemment compliquées et ses découvertes attribuées à d'autres.

Prodigieuses créatures est, au-delà de l'aspect biographique, une description des rapports de classe et de genre dans l'Angleterre de cette époque. L'autrice nous raconte avec une plume alerte cette vie parsemée de difficultés (Anning a surtout connu la pauvreté) mais aussi de rencontres et de soutiens inattendus de la part de quelques scientifiques qui permirent la reconnaissance de son travail. C'est un récit joyeux, débordant de vie, sur un personnage unique dont l'apport à la paléontologie est aujourd'hui incontestable ; Prodigieuses créatures est le plus bel hommage que la littérature pouvait lui rendre.

(il faut maintenant que je lise les autres romans de Tracy Chevalier !)

mardi 18 mars 2025

Black dog, Hu Guan

Après avoir purgé une peine de prison pour un homicide, Lang revient chez lui, dans une ville à la limite du désert de Gobi que les habitants quittent et abandonnent aux meutes de chiens. Il est recruté de force dans une patrouille de capture de chiens mais s'attachent à l'un d'entre eux, un squelettique chien noir.

Black Dog est un film désertique. Par son décor naturel (qui ressemble plus à un western italien qu'autre chose), par cette ville en cours de destruction, mais aussi par l'absence apparente de sentiment de son personnage principal, mutique la plupart du temps. La relation qu'il noue avec ce misérable chien est d'autant vivante et étonnante au milieu de ces décors à la limite du post-apo. Représentation d'une Chine pauvre essayant difficilement de s'accrocher à un quelconque développement, à l'opposé de la Chine triomphante de Shanghai et Beijing, cette ville en proie aux animaux (les chiens bien sûr, mais aussi les rescapés du zoo abandonné) permet à Hu Guan de réaliser un film avec peu de paroles mais beaucoup de scènes fortes et des plans incroyablement beaux. C'est un film extrêmement noir et parfois dur, parlant de survie et de mort, porteur de peu d'optimisme, mais rempli d'une poésie du désespoir.

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